Et si Uptake remettait le jazz au goût du jour ?


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Saro Goccer est un nissart qui s’énerve lorsqu’on l’appelle niçois, un pianiste féru de jazz, passionné de football et de l’OGC Nice, un grand amateur de pastis, qui a fraichement débarqué  de la Côte d’Azur pour faire ses classes sous la grisaille parisienne

 


 

Depuis quelques décennies, plus particulièrement depuis le début des années 90, le jazz connait un tournant sans précédent. Cantonné dans un costume de second rôle depuis la fin du siècle dernier, accusé pour sa complexité croissante non fidèle à ses sources pour certains, il semble être de retour sur le devant de la scène.

En effet, après les courants swing, be-bop, jazz-rock, jazz rap et autres, ce genre musical a enfin trouvé le bon filon pour séduire les tympans français, c’est ce que les charts semblent indiquer en tout cas. Quel est alors ce filon ?

Eh bien figurez-vous qu’il est impossible de le définir. Le rattacher, le caractériser, le comparer, mais pas le définir. Il s’agit ici d’un jazz massivement emprunt du sous-genre jazz-fusion et coloré de tons orientaux. Car oui, depuis une quinzaine d’années maintenant, le jazz est devenu synonyme de métissage et particulièrement en France sous l’impulsion d’un artiste à la renommée désormais internationale : Ibrahim Maalouf, l’homme à la trompette orientale. Il emmène dans son sillage d’autres artistes connus pour les amateurs du genre, tels que Avishai Cohen, Dhafer Youssef mais encore Tigran Hamasyan. Désormais, même les anciens de la trempe de Marcus Miller, le bassiste légendaire de Miles Davis, mélangent l’orient à leur jazz. Les nouvelles formations instrumentales décalées exposant des instruments plus insolites les uns que les autres pour la scène jazz, et les passerelles culturelles qu’octroie le genre se traduisent par une réapparition du jazz dans les playlists des musicophiles français. Le nouveau jazz tel qu’on pourrait l’appeler consacre un genre transfuge, une musique composite évoluant avec les auditeurs.

Si je me suis permis de faire un topo bref sur le sujet, c’est pour vous parler d’un groupe 100% frenchy qui correspond parfaitement aux lignes que vous venez de lire. Uptake, un groupe rhodanien de 4 musiciens à la composition déroutante : un piano, une batterie, une basse. Jusqu’ici, rien d’extraordinaire. Mais à cet ensemble se greffe un trombone, un instrument que fait parler Robinson Khoury, prix international du trombone jazz. Ce dernier d’origine libanaise vient ajouter cette touche orientale que les tympans français affectionnent particulièrement. Les ingrédients semblent être au rendez-vous ? Qu’en est-il de la préparation, de la recette ? De l’énergie, de la mélodie, un jazz audacieux qui ne se prive pas d’emprunter à l’électro ou de s’inspirer du hip-hop. Le caractère étonnant de groupe est ainsi d’autant plus sublimé. Le travail d’un son aux harmonies rondes et épurées se parachève dans la sortie de leur premier album, So Far So Good, un disque à succès présent dans plusieurs charts notamment avec le single The Way.


Live improvisé de la chanson Days in Montreux, lors du festival Cosmo Jazz de Chamonix


Les jeunes musiciens se voient récompensés par le prix Rézzo Focal de Jazz à Vienne, et du Tremplin Jazz de la Défense, deux prix décernés par deux festivals à la renommée croissante. Dernièrement, le tromboniste Khoury est invité sur scène par Ibrahim Maalouf lors de son concert à la philharmonie dédié à la diva égyptienne Oum Kalthoum. Khoury reçoit après les éloges de son aîné, la standing ovation d’un public impressionné par une prestation de haute volée. On se demander forcément quel est l’atout de ce groupe néophyte pour séduire les chroniques et revues musicales ?

Pour certains critiques, le rapprochement avec Snarky Puppy est évident. En effet, Uptake propose d’un côté à la fois de longs interplay, des rythmes qui ne sont pas des plus évidents à suivre, puis d’autre part des mélodies simples épurées. Ces mêmes mélodies qui retentissent toute une journée, ou bien durant un partiel, ces mélodies sobres qui peuvent prétendre emprunter notre esprit. Le groupe utilise un matériel de qualité lors de ses concerts et enregistrements studio, notamment le clavier Fender Rhodes, l’instrument inévitable utilisé par les plus grands jazzmen. Ce clavier accompagné de ces différents amplificateurs expose une palette de sonorités exceptionnelles que le groupe entend bien utiliser pour le plaisir de ses auditeurs. Un des morceaux qui illustrent parfaitement le style Uptake est Babeth, de leur unique album So Far So Good. Une introduction plutôt classique mis à part la présence de ce trombone. Peu après avoir concédé votre esprit à cette entrée en matière assez calme, la basse et le clavier se joindront pour vous réveiller immédiatement avec un chorus imprévu. Les tonalités orientales puis électroniques continueront de vous faire voyager, je ne vous en dis pas plus. Uptake démontre une réelle volonté de faire bouger les lignes et ne s’inscrit pas dans la lignée des groupes qui enlisent davantage le jazz dans une inertie délavée et inexpressive.

Vous pouvez écouter gratuitement l’album So Far So Good sur Deezer : http://www.deezer.com/album/10123980

Comme le disait un des cadors de cette école qu’est Dizzy Gillespie, « Pour jouer du jazz, tu as besoin d’avoir un pied dans le passé, et un autre dans le futur ». Tel est le chemin choisi par Uptake, ne rentrer dans aucune case pour développer une musique progressiste. L’enjeu réside en la réhabilitation du jazz au grand public, un chantier entamé en France par celui que je cite probablement trop, notre cher Maalouf. Le jeune groupe lyonnais est le candidat légitimé par tous les experts depuis quelques années pour reprendre le flambeau. Une mission qui a pour objet de diversifier le paysage musical français pour s’imposer ensuite sur la scène mondiale.

Uptake, un nom que vous n’êtes pas près d’oublier.


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