La nouvelle émission qui déclenche les passions : « Une ambition intime », le politique à échelle humaine. Le personnage politique fait tomber le masque qu’il use pour convaincre et laisse entrevoir sa vraie personnalité marquée par son passé.
Karine le Marchand, experte des discussions intimes et amoureuses de nos braves agriculteurs, vient défier le coeur des hommes et des femmes qui font l’actualité politique pour faire ressortir leur part d’humanité.
En ces temps connectés, où la réaction et la vindicte fleurissent à longueur de commentaires sur les réseaux sociaux, les politiques ne sont plus que des énergumènes dégénérés assoiffés de pouvoir et d’ambition au point de faire partie de nombreux complots interplanétaires. Les médias, friands de la moindre bourde et des détails gênants, tentent de réussir leur transition papier-internet par le buzz qui multiplient les clics et les likes. La vitesse de réaction éclipse la réflexion, mais me direz-vous, faut-il écrire un vrai article pour avoir des commentaires et de l’audience ? Le plus souvent un bon titre racoleur surfant sur la polémique permet de faire décoller, en terme de visibilité, un article sans contenu. Parfois même, des articles se résument à un tweet. On est donc loin de l’analyse de haute volée qui peut amener le lecteur à se poser des questions, à reconsidérer le débat, bref à réfléchir tout simplement. La jeunesse n’a pas le temps pour le papier, les quotidiens paraissent pour le troisième âge qui a appris à se lever tôt et qui ne change pas ses habitudes. Les notifications qui défilent en haut de l’écran suffisent, les tweets ont remplacé les tribunes et le lecteur ne devient que spectateur d’un monde de fous qui n’argumente plus au point que l’avis critique se transforme rapidement en insultes dans la masse des interactions de nos réseaux sociaux.
Après avoir dit cela, on peut espérer que la politique ne tombera pas plus bas et retrouvera un peu ses lettres de noblesse. Pour le moment, le prisme déformant de la presse à scandales et de la sphère internet est écarté le temps d’une discussion sur un canapé. Après le « Divan » de Marc-Olivier Fogiel sur France 3 qui tentait de devenir le psychologue de personnalités culturelles ou politiques, Karine le Marchand tente d’apaiser le personnage politique et son discours pour explorer la discussion intime. Elle a donc enquêté pendant plusieurs mois auprès des proches de chaque personnalité ayant accepté son invitation. Dès que les caméras tournent, le décor est parfaitement étudié et la confiance règne. Au menu, une entrée sur les passions ou hobbies traduisant une certaine personnalité, un accompagnement servit avec les origines familiales et les conflits marquants, et enfin un dessert saupoudré d’humour léger où les sourires et les regards complices détendent l’atmosphère. Karine Le Marchand critique subtilement et donne un ton maternel pour ne jamais briser le rythme lent et apaisant qui entoure les propos de chacun. L’entrevue permet au téléspectateur de découvrir ceux qu’ils croyaient connaitre.
On pourrait penser encore une fois que les invités, rompus à l’utilisation du verbe, se glissent dans la fente pour éviter la gêne ou l’émotion, mais leur interlocutrice ne leur laisse pas le choix avec les nombreux témoignages des proches qui dévoilent véritablement les petits secrets. La discussion est d’une surprenante sincérité à première vue, j’ose espérer que le tournage s’est fait au naturel, sans pression aucune. Néanmoins chacun veut assumer son passé et s’affirmer dans ce qui l’a construit, le dialogue a donc le mérite de briser la carapace et à la frontière de l’intime, de déceler les faiblesses, la vulnérabilité.
Le public est au rendez-vous car le programme dépasse même L’Emission politique de France 2 en terme d’audience, preuve que voir les gladiateurs en dehors de l’arène permet aussi de mieux cerner la personnalité qui supporte des idées qu’elle défend. Le modèle de l’émission ne participe pas à une « peopolisation » mais plus à une « humanisation » du personnage. Même si la comparaison est un peu risquée, on a l’impression que l’acteur phare vient donner une interview après la sortie de son film et qu’enfin chacun découvre que c’est un type comme les autres avec ses qualités et ses défauts. La force de l’émission tient dans le traitement égal que Karine Le Marchand réserve à ses invités, ils font tous l’actualité et ont tous de l’ambition et veulent imposer leur idées bien différentes mais ont tous droit au respect. La philosophie est moins « politiquement correcte », Marine Le Pen n’est plus une méchante laissée de coté de peur de causer la polémique, elle est démystifiée encore un peu plus. Certains se révulsent, d’autres applaudissent, la plupart approuvent.
La conclusion m’oblige à conclure : en résumé, une franche réussite télévisuelle, un peu de douceur dans ce monde politique mais surtout un regard apaisé sur ceux qui aspirent à nous gouverner. Cependant ne nous leurrons pas, le personnage reprend vite le dessus sur la personne, la vraie question est : est-ce de la politique ? Dans ce cas souvenez-vous que « la politique est l’art de se servir des gens » comme disait Henry de Montherlant.
Ennemond Chandon – Rédacteur à La Pravd’Assas
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