Cette musique. Oui, celle-ci. Celle qui résonne encore comme un écho dans la tête de chacun. Mais d’où vient cet air presqu’envoutant? Naturellement, quiconque saura reconnaître l’instrument, lui dont les notes si détachées mais indispensablement liées bercent les âmes humaines. Qui es-tu ? Que veux-tu? Justement, c’est bien cela, tout le monde le connaît, l’air, mais personne ne saurait expliquer l’état second, transcendant, dans lequel il nous transporte.
Ce rythme caressant les oreilles n’est que l’œuvre d’un « piano ». Fascinant dirons-nous, car tout fascine dans ce piano. Mais saurait-on vivre sans nécessairement écouter l’air aussi mystérieux que suave d’une musique jouée par un pianiste ? Aiguë est la question et grave est le sujet.
Le piano est l’allégorie du bonheur universel, voila la théorie, et il est bien simple de le revendiquer. Noir ou blanc, le piano ne fait pas la différence : chaque note est unique et d’aucune ne peut vivre sans que l’autre survive, car que serait un do sans le ré et que serait Remi sans son rat.
Et quel plaisir, oui, quel plaisir unique qu’est la tape du pied sur la queue raidie du piano qui rugit de plaisir. « Plus à gauche » semble-t-il dire lorsqu’il fait entendre ses gémissements et sa fragilité. Et en chacun se retrouve alors un Ulysse ensorcelé par ce chant de sirènes. Mais c’est à ce moment précis qu’une voix s’élève, plus rauque, paraissant prononcer « plus à droite ». Il grogne alors comme un loup. Gare aux croche-pied ou étourdissements ! L’erreur brise l’harmonie comme une vague se cassant sur le rivage.
Bien manié, c’est une douce symphonie que réalise l’artiste sur son piano sur l’autoroute de la jouissance. N’est-il pas sensuel de frapper des cordes qui, une après l’autre, émet son cri, entre la souffrance et le désir de recommencer.
Le pianiste, note après note, bouleverse son public enchanté, et surtout, cette fille, celle que l’on appelle la groupie du pianiste : ah oui elle l’aime, elle l’adore, plus que tout elle l’aime, c’est beau comme elle l’aime. Et puis, qui reste insensible devant l’artiste, le génie qui s’exprime. Gravé dans notre mémoire, le souvenir est impérissable, on s’en rappelle comme si c’était hier, même sa posture : il jouait du piano debout, c’est peut être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup.
Attendri et repus de ce buffet orchestral, du doigt, l’homme, semble toucher l’éternel, l’infini, le bonheur, un château en Espagne qui se rapproche le temps d’un instant, lentement, piano piano.
Rayan RIFAI