4 septembre. 7h30. Ça y est, c’est la rentrée. Tu vas bientôt revoir tes potes, ta fac, ta target. Il est l’heure de faire le bilan de tes vacances, histoire de ne pas bégayer en albanais quand on te demandera ce que t’as fait pendant ces deux mois. Tu hésites même à préparer ce que tu vas dire, à le noter, pour paraître intéressant dès le premier jour, car oui, il est impératif de marquer son territoire, et ce, au premier pas fait dans ton université. Par quoi commencer ? Quoi raconter ? Comment impressionner sa bande ?
A peine bronzé, tu reconnais que le soleil n’aura pas été ton meilleur ami pendant ces vacances, t’abandonnant souvent quand tu flânais dehors, ou alors pointant le bout de son nez quand tu enfilais les heures dans ta chambre, manette à la main. Lucide, tu sais que tu ne pourras pas mettre en valeur ta peau blanche comme neige. Tes vacances ? Rien de fou : une semaine en Bretagne « pour te retrouver », et le reste chez toi, à Paris, seul, sans le sou pour partir vers de nouveaux horizons. Tu sais alors que tu ne pourras pas compter sur les mots pour briller. Il ne reste alors qu’une seule alternative.
TROIS BANDES, UN DESTIN
Tes fringues. Elle est là, la solution pour ressortir du troupeau d’étudiants qui s’agglutineront devant la porte de la fac pour commencer, non sans pleurs, une nouvelle année. Alors tu ouvres ton armoire, et ce qui en tombe, te fait lever un sourcil, voire les deux. Trois bandes sur le côté, tu n’avais jamais osé mettre ce jogging que ta tante t’avait offert pour ton anniversaire. Mais, là, tu n’as pas le choix, il faut prendre des risques. Tu ne mises plus tout sur le rouge, mais sur ces bandes, parfaitement parallèles, allant de la hanche à la cheville. Et tu sors de chez toi, un peu inquiet, impatient d’entendre les remarques sur ton style vestimentaire. Et celles-ci s’avéreront unanimes : tu as éclaboussé les gens de ta classe. Pourquoi ? Comment ? Retour sur un phénomène. Décryptage.
LA PREMIÈRE BANDE : LA BANDE-ANNONCE
La première bande est la plus extérieure. D’une couleur uniforme, elle est saillante, précise. Pas de fioritures. Juste une bande, simple, belle, qui ne fait pas de vagues. Peu importe le temps, et la personne qui porte le jogging, elle reste droite, inflexible. Il est dit que cette bande est celle qui attire le regard en premier. Elle te laisse en suspense. Les images défilent, la bande reste.
LA DEUXIÈME BANDE : LA BANDE PASSANTE
Son nom vient de sa position. Entre la première et la troisième, la deuxième bande passe au milieu des deux autres. Malgré l’étroitesse entre celles-ci, la bande passante continue son chemin, sans batifoler vers les côtés. Muette, elle semble pourtant chanter, et les badauds tendent l’oreille. Bien que prisonnière entre ses sœurs, elle ne se plaint jamais et laisse les autres parler pour elle. C’est un signal fort qu’elle transmet lorsqu’elle anime le débat et contrôle le débit de paroles.
LA TROISIÈME BANDE : LA BANDE DESSINÉE
On l’appelle la bande dessinée parce que c’est celle qui arrive comme un cheveu sur la soupe. On la pense inutile, voire imparfaite, mais c’est bien elle qui maintient l’harmonie de l’habit. Ce que peu savent, c’est que cette bande est en réalité le prolongement de milliers de points disposés à une distance infinitésimale. Néanmoins, l’œil ne voit que la continuité des images, et ne se doute pas de la complexité artistique derrière cette articulation séquentielle.
LE JOGGOS LE PLUS SOUS-CÔTÉ
Certes, on parle de Boys band, mais c’est un abus de langage car le tribande est unisexe, pour les hommes, les femmes, les grands, les petits. Tout le monde en parle, même dans le milieu du grand banditisme. N’hésite plus, enfile ton joggos, et sauve ta rentrée qui ne sera pas la grande débandade annoncée.
Trois bandes, un jogging. Tel un drapeau, le tribande rassemble tous les Hommes. On se bat pour lui, on le protège. On s’est moqué de lui, désormais on lui doit la paix. On a même fait des conférences pour parler de lui, à Bandung. Déployons nos banderoles, suivons notre leader Antonio Banderas. Qu’il vente, qu’il pleuve ou qu’il neige, rendons lui grâce, et unissons-nous tous, pour l’arborer fièrement, chaque jour que le monde nous donnera.
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