Très anc. comp. ; issu de la locution a bandon dans laisser, mettre a bandon : à la discrétion, à la merci.
Ayant le pire syndrome de la page blanche qui n’a jamais existé, j’ai décidé de forcer l’inspiration et d’ouvrir le dictionnaire. Mais pour vous maintenir, vous étudiants d’Assas passionnés par l’univers juridique, c’est le Vocabulaire juridique que je choisis d’ouvrir (c’est surtout parce que je n’ai aucun autre dictionnaire chez moi).
A la première page, on a le plaisir de trouver la définition de l’Abandon. Bon signe. Le message est assez clair, général et destiné à tout étudiant en droit. Ce signe devrait être significatif et nécessaire pour nous tous en cette période post-résultat de remise en question absolue. Il est légitime maintenant plus qu’à tout autre moment de se demander si notre existence importe un tant soit peu. Peu importe si ce mot avait été là éternellement, débutant cet ouvrage par une touche des plus optimistes, nous permettant de nous lancer dans la voie juridique sans aucun questionnement, aujourd’hui il gagne une toute autre importance : il nous est destiné spécifiquement.
C’est à nous que ce message s’adresse, c’est à nous que le livre parle. Il n’y a aucun doute là-dessus. Vous avez toujours pensé être le personnage principal de votre histoire, de votre vie, alors il est évident que si ce signe s’adresse à quelqu’un ça ne peut être qu’à vous !
Puis, si on observe la chose d’un peu plus près, ce signe vous a toujours accompagné. Il était là, la première fois que vous avez acheté votre Vocabulaire juridique. Encore plus si vous avez abandonné la perspective de cet achat. Ensuite, il était là à chaque fois que vos doigts effleuraient les pages de ce dictionnaire à la recherche de l’énième définition qui permettrait à votre dissertation d’avoir une once de connaissances, sans pour autant avoir à faire l’effort de consulter un cours. L’abandon, c’est aussi ce qui vous conduit à ne même pas consulter le dictionnaire à partir du 5ème TD de l’année, parce que de toute façon connaissances ou pas, le droit des obligations c’était jamais fait pour vous.
Mais l’abandon c’est surtout votre compagnon nocturne, qui vous berce la nuit, lorsque la terreur des partiels vous empêche de dormir. C’est lui, qui, dans les heures les plus sombres, murmure au creux de votre oreille «au pire, tu peux arrêter». Lui qui vous offre le réconfort d’une échappatoire, d’une vie sans la recherche d’un II- B, d’un monde où les gens ne peuvent pas se permettre de dire naturellement « in fine » dans une conversation.
Paradoxalement, l’abandon est celui qui ne vous a jamais abandonné. Il a toujours été en vous, même lorsqu’il était bien enfoui, votre compagnon de misère. Il me semble, alors, légitime de vous conseiller de ne pas être imperméables au conseil de Gérard Cornu et d’abandonner, vous savez que vous en avez envie.
Aïcha ABASSI
Un très bon article, très bien écrit !
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