Au jour d’aujourd’hui, et plus que jamais, le rire est en politique une arme formidable. La plus terrible de toutes, certainement : bien maniée, l’ironie fait des ravages. Bien tournée, une réplique réduit au silence. Et qu’il y ait un public, et qu’il y ait un rire, et l’on sait d’avance avoir remporté une victoire ; un éclat d’hilarité n’est jamais neutre, surtout dans le terne quotidien de nos démocraties.

La plaisanterie pourrait avoir assez durée, mais sur le grand théâtre de la vie publique, on ne s’en lasse pas, bien au contraire, on en redemande ! La maîtrise de la petite phrase peut déboucher sur un véritable culte de la personnalité permettant d’accepter le trait d’humour comme une vérité générale, tandis qu’exprimer longuement une pensée aboutie et détaillée tend invariablement à perdre le public visé, aussi brillant soit-il, qui doit s’y reprendre à plusieurs fois avant d’espérer percevoir le fond d’un message dépassant de loin les 140 signes.

Il n’est ainsi pas rare de fonder toute une carrière politique sur une blague, et a contrario d’être victime de son propre humour. Arme non-létale, mais belle, et bien redoutable ! Craignez le trait d’esprit qui fera de vous le bouffon de l’Opinion, et riez avec les rieurs. C’est une vaste farce, dans laquelle la course aux honneurs se mue en concours de punchline.

Et dans la recherche de la formule magique qui ouvrira les fonctions les plus prestigieuses, on embauche à la pelle. Communicants et designers sont les faiseurs de roi de demain, et sur un slogan on est porté aux nues ; et sur un slogan on est jeté bas. Qui sait, un jour peut-être les désaccords partisans se règleront autour d’un rap contenders ?

Mais on rigole, on rigole, et personne ne sait si, le rire étant contagieux, l’on peut attraper les convictions d’autrui en riant avec lui.

Food for thoughts !

Guillaume Blanc